Entretien inédit avec Ornella Volta (2021)

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« J’avais sollicité un premier entretien avec Ornella Volta afin de lui exposer le projet de film que j’avais imaginé autour du compositeur Erik Satie. D’entrée, elle ne me donna qu’un seul conseil : « Ne faites pas ce film, car il y a déjà trop de choses stupides et ridicules qui ont été entreprises autour de son œuvre ! ». Malgré cette injonction, qui traduisait déjà le caractère bien trempé d’Ornella, nous nous revîmes plusieurs fois devant un petit apéritif parlant de tout et de rien. Prudemment, je ne lui exposais plus jamais mon projet de film, mais nous parlions volontiers de ses recherches et de son travail d’écriture encore et toujours autour de Satie. C’est à cette époque que je lui demandais un entretien filmé qu’elle m’accorda. C’est aussi au fil de ces rencontres qu’Ornella me confia, à plusieurs reprises, son désir de faire paraître un ouvrage « définitif » sur le compositeur qui reprendrait tous les travaux qu’elle lui avait consacré pendant près de cinquante ans. Puis, après bien des hésitations, elle se décida à me montrer le texte complet qu’elle avait patiemment tapé sur son iBook et tenté de mettre en page elle-même. Je ne pus que lui faire remarquer que la mise aux normes professionnelles d’un livre de mille pages n’était pas une mince affaire et que cela dépassait surement le cadre de ses compétences. « Mais vous, vous pouvez le faire ! » me lança-t-elle avec le ton d’autorité que je lui connaissais bien. Parallèlement, je la voyais si désemparée et si inquiète de ne pouvoir aboutir ce denier ouvrage avant sa mort, que je me promis de l’aider au mieux de mes connaissances. C’est ainsi que trois après-midi par semaine, je me rendais chez elle pour mettre en page ce livre ou classer des archives. Mais le problème fut que six mois plus tard, nous n’avions abouti qu’un tiers de l’ouvrage et dans des conditions très conflictuelles pour moi : ses injonctions et ses critique devenaient de plus en plus difficiles à supporter, et plusieurs fois je la menaçais de renoncer à ce travail. Constamment, elle modifiait et réécrivait ce que nous avions abouti ensemble et je ne m’imaginais pas supporter encore cela pendant une année entière. Affecté, je finis par lui signifier mon désir de renoncer à ce travail. Sa réaction fut, de façon attendue, très excessive et elle me maudit presque de l’avoir abandonnée au beau milieu de ce projet. Plusieurs mois après, j’apprenais, par hasard, son décès quelques jours seulement après son enterrement. J’étais triste de ne pas avoir pu lui confier une dernière fois mon admiration et mon respect pour tout ce qu’elle avait patiemment entrepris pour la mémoire d’Erik Satie. Qu’elle repose en paix, à présent»
Lionel Baillemont, Avril 2021







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